musique d'ambiance**Guiladeä...Irismëa...Reposez en paix.**
Depuis tant d'années déjà.
Etait-il seul?
Perdu dans l'immensité de la neige immaculée, entouré d'un voile de flocons satinés qui dansaient leur lente valse dans les airs, le jeune garçon était debout, l'esprit tourmenté par les fantômes du passé.
Le regard vide, mais sans cesse le même masque apposé sur le visage, il repensait irrémédiablement à sa famille. A ses amis. A tous ceux qui reposaient sous une épaisse couche de glace cristaline désormais. Prisonniers dans la affres du froid et l'étreinte glaciale de la mort au fond de leur cerceuil glacé et de leur linceul de neige, ils devaient reposer, comme simplement endormis. Seuls.
...Lui en voulaient-ils?
Lui même était seul désormais.
Son destin l'avait amené à se punir lui même.
Seul.
Comme ce mot semblait perdre toute signification désormais...
Son sourire ne l'avait jamais quitté.
Mais ses yeux, loin d'être rieurs, cachaient une émotion bien plus pesante que ce qu'il aurait voulu laisser entrevoir.
Les yeux sont le miroir de l'âme, selon une croyance populaire...Aussi préférait-il les fermer. Car ses yeux, comme sont âmes, n'étaient qu'un puit sans fond où il était trop facile de se perdre et de se noyer. Comme les bords d'un puit abandonné depuis trop longtemps aux dégâts du temps, il était insondable et mortel, condamné a engloutir et faire dépérir ceux qui s'y sentaient attirés.
Aujourd'hui encore, c'était un anniversaire pénible et plein de regrets. Qu'était-il devenu à force de grandir dans ce cocon parental et trop serré pour respirer? Il avait grandi seul. Mais il savait qu'il comptait pour certaines personnes. Et leur amour le forcait à leur renvoyer le sien, comme on rend un baiser.
Jeune, il s'était perdu.
Loin de toute famille, ses camarades de misère et lui formaient la seule famille dont il avait jamais eu besoin.
Mais désormais, ni ses anciens acolytes, ni même ses parents adoptifs n'étaient là. Et ils ne seraient plus jamais à ses côtés. Et pour chacun d'eux, pour avoir trouvé la mort au détour du passé, il était le seul responsable. S'ils étaient morts, il ne pouvait blâmer que lui.
Et cette pensée le meurtrissait. Se montrer délicat risquait-il de finir par semer la mort, à nouveau?
Heurter les gens qu'il aimait était-il le seul moyen qu'il avait trouvé d'exister? Si tel était le cas, aimer devenait dérisoir. Et toute émotion ne valait pas la peine d'être ressentie. Mais même ainsi, il risquait de devenir trop froid et refermé. Ainsi inhumanisé, il deviendrait telle une lame, glacée et tranchante, blessant quiconque l'étreint. Condamné à ne jamais recevoir une caresse qui ne finisse dans le sang. Mais n'était-ce pas déjà arrivé? Il priait que non...
Au creu de sa main se tenaient des pétales d'un autre temps. Aujourd'hui, il y a bien longtemps, tous mourrurent malgré lui.
Aujourd'hui, il se devait de rester seul, loin de toute humanité.
Lâchant les pétales rougâtres dans le vent glacé des plaines désolées, il les regarda, emportés par le vent.
Dans son esprit résonnaient encore les promesses formulées sur le lit de mort de ses amours.
Et tandis que les pétales, comme un pardon ignoré, reprenaient une teinte blanche, charriés par le vent, Sin restait seul avec ses pêchés. Seul à contempler l'étendue blanche de ses fautes passées. Seul avec son destin.
Seul.
Pour toujours, probablement.
Seul avec la promesse fébrile qu'un jour, lui même devienne quelqu'un de meilleur.
Qu'il cesse de détruire irrémédiablement tout ce qu'il touche du bout des doigts, ou du bout des lèvres.
Et l'espoir qu'un jour, il puisse, lui aussi, goûter au bonheur d'aimer pour être aimé en retour.